Comment maintenir sens, lien social et mobilisation collective ?
Interview, témoignages , partages d’expériences, échanges… Jeudi 8 octobre 2020, Fabienne Simon et Geoffrey Carpentier ont animé un webinaire consacré à l’engagement dans le contexte du Covid.

La synthèse des échanges avec Emmanuelle Germani, DRH/DSI Kaporal et Franck Coste, CEO groupe Chanoine Frères avec Fabienne Simon et Geoffrey Carpentier, Observatoire de l’engagement.

4 grands thèmes se dégagent des échanges :
1. Un sentiment général d’inquiétude, dans un contexte d’incertitude générique. Dans ce contexte la clarté de la communication et le professionnalisme des top managers rassurent les collaborateurs. Il est nécessaire de véhiculer des informations plutôt positives tout en restant honnête et transparent. La notion de confiance réciproque est importante*.

2. L’identification de mouvements d’innovation spontanée. La contrainte rend certains choses possibles alors qu’elles étaient impensables auparavant. La contrainte amène une créativité qui n’existe pas en temps normal. Cela génère des innovations tant au niveau des modes de travail, de l’organisation des process de travail, qu’au niveau du business model de l’entreprise.

3. Les facteurs d’engagement – les nombreux exemples apportés permettent d’identifier certains facteurs favorisant l’engagement :
• La culture d’entreprise, favorisant un engagement normatif envers l’entreprise : les collaborateurs s’engagent envers l’entreprise parce qu’ils se sentent redevables envers elle ou envers les propriétaires familiaux de l’entreprise ;
• La cohérence globale de l’équipe dirigeante dans la démarche de réponse à la crise ;
• La communication claire pour convaincre les collaborateurs et démontrer que les pratiques fonctionnent ;
• Le fait de prendre soin des collaborateurs de façon sincère, avant de regarder les éléments financiers ;
• L’exemplarité du dirigeant et le maintien de la proximité (salutations, se tenir aux côtés des collaborateurs)

4. Alors que le niveau e mobilisation est très fort en cette période de crise, la problématique du maintien de ce niveau d’engagement sur le long terme se pose, en particulier si les activités à distance se poursuivent. La construction d’un vrai collectif avec un mode de travail à distance pose question sur le long terme.

Une mise en perspective par Lionel Garreau, directeur de recherche en stratégie et organisation à l’université Paris Dauphine – PSL.

Nous vivons une situation exceptionnelle qui bouleverse le rapport des collaborateurs aux entreprises.
D’une part, les entreprises ont besoin d’un niveau d’engagement élevé pour surmonter la crise actuelle. Elles attendent de leurs collaborateurs des efforts supplémentaires, d’aller au-delà du niveau d’effort habituel, afin de permettra aux entreprises de survivre dans un premier temps et de s’adapter aux nouvelles conditions d’exercice. On retrouve ces attentes dans les médias où on trouve une injonction à se mobiliser, à s’engager pour sauver ce qu’il reste à sauver de l’activité économique.

D’autre part, on observe un recentrage des collaborateurs sur « ce qui compte », et ainsi souvent un arbitrage plus clair qu’auparavant en faveur de la qualité de vie, de la vie de famille, etc. Le confinement a parfois révélé certaines positions de la part des employeurs, des refus de télétravail, du présentéisme, une non-adaptation aux contraintes personnelles, etc. Certains acteurs ont ressenti une pression jugée inutile en ces temps de crise, et a modifié le rapport à leur employeur.
Ces deux mouvements, demande d’un engagement supplémentaire vs. recentrage sur les éléments essentiels crée une tension à résoudre tant au niveau des organisations que des collaborateurs eux-mêmes.

Par ailleurs, la crise est l’occasion, comme toujours d’un renouveau. Cette notion de renouveau est même inhérente au concept de crise dans certaines cultures comme la culture chinoise par exemple. Ici, grâce à cette crise majeure, ce sont des opportunités de transformation profondes qui se présentent :
• On observe le passage d’une situation de crise sanitaire à la construction, la formalisation, d’attentes vers des entreprises qui proposent de plus en plus de solutions en lien avec le développement durable et la RSE ;
• Cette situation doit permettre aux entreprises d’amorcer un mouvement stratégique qui répond à ces attentes ;
• Ces mouvements stratégiques pourraient être un vrai vecteur d’engagement car il s’agit d’un moyen de repenser la mission, le ‘strategic purpose’ de l’entreprise. Cela donne un cadre attractif pour une nouvelle construction de sens, qui valorise l’entreprise et les acteurs qui y participent.

*Notons que faire confiance consiste à de mettre ne position d’incertitude par rapport à autrui. Sans incertitude, il n’est pas nécessaire de faire confiance. Il faut donc incertitude pour que la confiance soit nécessaire et la confiance est le fait d’accepter l’incertitude du comportement d’autrui.